Hier soir, une famille de touristes français mangeait à une table derrière moi, j’ai tendu l’oreille pour les écouter échanger leurs impressions de voyage. « Quand on a vu 2 temples, on les a tous vu ».
Sous forme de récit de voyage (octobre 2018) je vous fais découvrir cinq temples un peu différents : un temple historique à Ayuthaya, le Wat Dhammakaya sorte d’OVNI dans le bouddhisme (nord de Bangkok), un temple forestier (près du parc national de Khao Yaï), le « Village des Pruniers » de Thich Nhat Hanh, et enfin un temple très coloré (entre Korat et Chayiaphum, Issan), qui m’a plus fait penser à un parc d’attraction qu’à un lieu de méditation.
Prologue, récit de voyage
Dimanche 14 octobre 2018
Au réveil, je prépare mon petit bagage, je rassemble des habits pour une semaine, je si commence à me poser trop de questions je sais que je ne partirai pas. Dans mon sac à dos j’emmène mon ordinateur portable, mon appareil photo et ajoute le nouvel objectif grand-angle que je me suis offert. Je fourre mon sac dans le coffre de ma moto et départ !
Premier arrêt à 20 mètres de chez moi pour un café. Je regarde la carte et décide de mon itinéraire.
Je roule, à midi, je suis à la hauteur de Theun, je m’arrête pour manger un riz, la cuisinière me prépare une assiette bien copieuse. Il n’y a pas trop de circulation sur la route nationale 1 aujourd’hui. Mais beaucoup de camions que je dépasse par la gauche.
J’arrive à Kampeng Phet vers 16h. Je pourrais continuer encore une heure, mais il est temps de se reposer. Je me trouve une petite chambre sous la forme d’un bungalow dans un jardin fleuri, je m’installe sur la terrasse et bois un coca en regardant le jour se terminer.
Lundi 15 octobre 2018
Au programme aujourd’hui, la descente sur Lopburi par les petites routes qui traversent les rizières. Une pause de midi à Nakon Savane, une ville que je ne connais pas bien, il fait très chaud, le soleil me brûle.
Dix kilomètres avant Lopburi, le ciel s’assombri et la pluie éclate sans prévenir. Sur la droite, devant un temple, je vois un stand de café. Je gare ma moto sous un arbre, cours m’abriter et demande un café « traditionnel ». Un couple tient ce stand, on échange quelques phrases. Un moine rammène une tasse et échange une plaisanterie avec le couple. La pluie s’arrête, je veux payer mais la femme me dit qu’elle m’offre le café.
Mardi 16 octobre 2018
Je quitte Lopburi en suivant le canal d’irrigation, direction Bangkok. Je n’ai pas envie d’entrer dans la mégapole en moto, je m’arrête à Ayuthaya, je réserve une chambre pour jeudi dans un petit immeuble, j’y laisse ma moto au parking et vais prendre un minivan pour Bangkok. Il reste 70 kilomètres. Une heure plus tard le minivan me dépose devant la station de métro de Chatuchak, encore une petite heure de métro et me voilà à Lumpini au centre de la tumultueuse Bangkok.
Jeudi 18 octobre 2018
De retour à Ayuthaya, je retrouve ma moto et commence par aller (re-)visiter le site archéologique du temple de Chai Wattanaram. J’étais déjà venu le mois dernier, j’avais été déçu de ne pas avoir assez de recule pour faire mes photos. Depuis, j’ai acheté un objectif «grand-angle ».
Ayuthaya a été la capitale du Siam jusqu’en 1767 lorsque l’armée birmane a envahi et détruit la ville. La capitale a été rebâtie plus en aval du fleuve Chao Phraya dans ce qui est maintenant Bangkok.
Wat Chai Wattanaram
Je commence par boire un café de l’autre côté de la rue. Mauvaise surprise, c’est un nescafé, mais je suis content de m’asseoir un moment à l’ombre.
Un couple d’espagnols me demande de les prendre en photo avec leur camera. Un groupe de Thaïlandais s’organise une séance photo, ils se sont costumés avec des habits d’autrefois. On peut louer des costumes sur les abords du site historique. Pour beaucoup de Thaïlandais, ces ruines servent avant tout de décor pour leurs propres portraits. Un groupe de touristes chinois débarque avec un guide (chinois ?) qui grimpe sur une ruine pour mieux parler à son groupe. Je lui montre la plaquette qui demande à ne pas grimper sur les ruines, il me fusille du regard et descend.
Les Thaïlandais n’ont un goût pour ce ruines que limité. Depuis quelques années, les feuilletons télévisés et quelques superproductions cinématographiques ont mis en scène des histoires de ces siècles passés. Beaucoup ont maintenant envie de se parer d’un costume d’époque et de se prendre en photo pour ressembler aux princesses vues sur les écrans. Mais jusqu’à peu de temps encore, ces ruines représentaient la honte d’une défaite contre le féroce ennemi birman et Ayuthaya, dit-on, est peuplé par les fantômes.
Je reprends la route et parcours 45 kilomètres en direction de Bangkok. Je suis effrayé par les ceintures autoroutières, par les autoroutes qui ont toujours plus de voies. Je dirige ma petite Honda Wave du mieux que je peux dans le quartier de Rangsit près de la grande université de Tammasat. A 15h30, j’entre dans l’enceinte du gigantesque temple de Dharammkaya.
Wat Dhammakaya
Ceux qui suivent l’actualité savent que le temple de Dhammakaya s’est rendu célèbre l’année dernière alors que la police a tenté d’arrêter le moine supérieur accusé de fraude et de malversations. Les fidèles avaient bloqué les accès pendant plusieurs jours en récitant des montras bouddhistes. Le moine n’a pas pu être arrêté. On dit qu’il aurait obtenu l’asile politique dans un pays européen.
Le récit complet de ma visite se lit sur un texte séparé : Wat Dhammakaya, un ovni dans le bouddhisme.
Le stupa en forme de soucoupe volante se trouve au centre d’une place de quatre kilomètres carrés, entièrement bitumée, qui peut contenir 400’000 personnes. Le hall qui entoure la place possède un étage avec 600’000 places assises sur des gradins.
Vendredi 19 octobre 2018
J’ai pris la direction de Korat. Je suis heureux de quitter la nationale 2 au niveau de Pak Chong pour m’enfoncer dans la nature proche du parc national de Khao Yai. Au programme, je vais rendre visite du temple de Thich Nhat Hanh, la version thaïlandaise du « village des pruniers » du sud-ouest de la France.
Un Temple forestier
Après un arrêt pour manger un curry végétarien appelé « curry de la forêt » (un de mes plat préféré parce que très relevé), je sillonne entre de jolies collines de la région de Khao Yai. Surprise: un temple a été construit sur une colline, il est fait de plusieurs bâtiments très différents, en forme d’animaux et de visages. Je passe le portail, et parque ma moto devant ces constructions disparates qui me font penser à la Maison du Facteur Cheval.
Des arbres, une végétation envahissante, des chats qui dorment, des chiens qui aboient en sentant ma présence. Une femme balaye des feuilles mortes. Elle me demande comment est-ce qu’il se fait que je connaisse ce temple. Je lui explique que je passais par hasard et que trouvant l’endroit intéressant, je me suis arrêté. Elle m’explique que ce temple est en construction depuis de nombreuses années, qu’ils ont encore besoin d’argent pour le finir et qu’elle craint que les travaux ne puissent pas reprendre de sitôt « parce que nous ne recevons pas d’argent du gouvernement », et parce que les donateurs sont devenus rares. Elle vient régulièrement nettoyer le lieu comme bénévole. Elle me dit que le moine habite sur la colline, si je monte je pourrai le voir.
Malgré la chaleur et l’humidité, j’entreprends la montée par des escaliers raides envahi par la végétation. La vue sur la région est très belle. Je zigzague entre des statues de tigres, d’éléphant, un arbre en ciment sur lequel les fruits sont des humains!
Puis, je vois une tête de tigre, gueule ouverte, dans laquelle est garée la Mercédès du moine. Je ne croise personne, sinon un groupe de chats, le moine doit faire la sieste dans un endroit plus frais. Le sutpa au sommet est sous un échafaudage de bambous. Des bidons de peintures et des sacs de ciments attendent que les ouvriers reviennent.
Ce temple porte le nom de Wat Simalaï Song Tham. Il est l’oeuvre d’un moine-ermite qui professe la sagesse du bouddhisme. Il a dit « Lorsque vous donnez ou devez faire quelque chose, ne désirez rien. » Donner sans rien attendre en retour, voilà qui est en opposition complète avec la philosophie du Wat Dhammakayam et voilà qui explique peut-être que les donateurs soient plus rares.
Une dizaine de kilomètres plus loin, j’ai l’impression que je suis dans une campagne reculée, j’ai complètement oublié la Nationale 2, ses huit voies et ses camions par centaines.
Plum Village
« Plum Village », le centre monastique où réside actuellement le moine vietnamien Thich Nhat Hanh n’a pas de clôture comme dans les temples, mais une forêt d’arbres fruitiers. De grosses pierres marquent le chemin, « vous êtes ici, vous êtes arrivés », « un pas après l’autre », je reconnais les phrases que le Maître Zen à offert en mantra à ses disciples.
Ici, pas de « temple » à proprement parler, mais des bâtiments utilitaires comme un grand réfectoire ouvert sur trois côtés, des gongs, une cuisine, des habitations. J’ai le sentiment d’être dans un lieu de vie et non un endroit où l’on vient s’agenouiller.
Je vois marcher des nones dans l’habit brun, chapeau vietnamien conique sur la tête et sourire au visage. Je ne connais personne ici, je n’ai pas prévenu de ma visite et ne vois aucun «accueil de visiteurs», aussi je décide de faire une marche méditative dans ce grand verger aménagé.
Sur les hautes branches d’un arbre, un carillon émet une musique au gré du vent, j’en ai des frissons tellement c’est beau. Plus loin, des dizaines de balancelles sont attachées aux branches des arbres et enfin une statue de Bouddha posé sur un rocher devant un banyan. C’est très sobre, pas de mise en scène inutile, aucun culte de la personnalité. Je déambule, je me sens bien dans cette simplicité. Je ne suis pas abordé, personne ne me demande ce que je fais ici.
Je vois une maison un peu plus grande que les autres avec un toit en paille. Il y a de très belles fleurs tout autour, j’ai l’impression que c’est ici que celui que l’on appelle Thầy (professeur en vietnamien) habite. Je ne vais pas approcher plus de peur de troubler la quiétude du lieu.
Thich Nhat Hanh a fêté ses 92 ans il y a semaine. Fortement engagé pour la paix pendant la guerre du Vietnam, il a prôné la résolution du conflit dans la non violence. Forcé à vivre en exile, il a fondé le « village des pruniers » dans le Lot et Garonne où il a vécu de nombreuses années. Depuis 2016, il a fait le voeux de revenir en Asie pour se rapprocher de son Vietnam natal.
Samedi 20 octobre 2018
Le temps est couvert, la météo annonce un week-end très pluvieux. Je n’aime pas rouler sous la pluie mais j’ai décidé de rejoindre Chayiaphum et de visiter en chemin le Wat Ban Rai (temple du village Raï). Il s’agit d’un autre temple très récent, lieu de pèlerinage de nombreux Thaïlandais.
Wat Ban Rai
Le temple en lui-même est de style Thaï-central tout à fait ordinaire. Les foules de visiteurs commencent par aller se prosterner devant des statues, je saute cette étape pour me rendre directement devant ce qui est considéré comme un « musée ». Il s’agit d’un bâtiment en forme d’éléphant construit au milieu d’un lac artificiel. Le bâtiment est haut comme quatre étages.
On monte en empruntant une rampe qui tourne autour de la coupole. Au premier niveau, une exposition présente toute l’histoire du bouddhisme, ses diverses branches, (le petit véhicule, le grand véhicule, le zen, le tantrisme) et des personnalités bouddhistes de notre temps, dont Thich Nhat Hanh ou le Dalaï Lama. Jamais je n’avais vu une présentation aussi précise et didactique.
Dans le flot des visiteurs, tout le monde se prend en selfie ou en photo de groupe, on me demande de poser avec certaines personnes, il faut dire que je ne passe pas inaperçu dans la foule.
L’abondance de couleurs et l’étrangeté des statues fascine certainement plus ici que les statues de Bouddha qui sont très peu nombreuses.
Je regarde une nouvelle fois les prévisions météorologiques, je décide de ne pas aller passer la nuit à Chayiaphum mais de redescendre dans la plaine centrale à Lopburi. Je ferai les 60 derniers kilomètres sous une pluie battante, mais je pense que je vais ainsi échapper au pire des intempéries. J’aime bien Lopburi. Demain je continue pour Phitsannulok et serai à Chiangmai lundi 22 octobre en fin de journée.
toutes les photos ©fredalix octobre 2018, aux dates et aux lieux indiqués dans le cours du texte.
merci de m’avoir lu jusqu’au bout 😉
Tu nous a préparé un beau texte qui explique bien les photos. Merci de ton recit qui est très interessant à lire. Les photos sont superbes aussi. Il y a toujours a visite dans ton pays en Asie ! Merci d’avoir pris le temps de nous raconter. Sur mon blog La Marche tu pourras lire bientot nos journées en Italie. Tu as du recevoir un mail a ce sujet. Ciao Fred.